vendredi 4 décembre 2015

Lutter contre les abandons: changer l'image du chien.

Souvent, lorsqu'une petite annonce pour le placement d'un chien circule sur les réseaux sociaux, elle déclenche des réactions de colère assez impressionnantes. Les premiers propriétaires du chien sont insultés de tous les noms, leurs motifs raillés et assez souvent on leur souhaite d'être attaché à un pylône électrique cet été.

Bon dans l'absolu ça ne me dérange pas qu'on prenne en grippe des gens qui se débarrassent de leur animal, parfois de façon abominable et qui me font me demander si ce ne sont pas des sociopathes. Même si il ne faut quand même pas omettre que dans le lot de ces gens qui replacent leur chien, il y en a pour lesquels c'est un réel déchirement.

Quelque soit le profil de ces personnes, elles ont toutes en commun de ne pas pouvoir/vouloir prendre soin de leur chien. Et par conséquence tous ces chiens ont une chose en commun: l'abandon est finalement la meilleure chose qui puisse leur arriver!

Dans le cas de Linux, qu'il ait été abandonné est en fait une excellente nouvelle. Manifestement battu, il a franchement gagné au change.


Parce que qu'est ce qui est le mieux pour eux finalement? Qu'ils restent dans leur famille, alors même qu'ils ne peuvent pas s'y épanouir, sont souvent délaissés et parfois même maltraités, parce que l'abandon c'est le mal? Ou qu'ils quittent cet environnement qui ne leur convient pas pour un foyer qui pourra répondre à leurs besoins?
Pour moi les campagnes anti abandons sont un non sens: aucune personne n'abandonnera son chien sur le bord de la route pour partir en vacances si elle lui consacre ne serait ce que le quart de l'attention, de l'affection et du temps qu'on doit avoir pour son chien. Ces personnes là ne se sépareront de leur chien que si elles y sont forcés, et certainement pas de façon si lâche.
Et en fait même les chiens appartenant à ces personnes là gagneraient parfois à être replacé. Cela risque d'en faire bondir un bon nombre, mais non une vie dans un pavillon, avec un tour de quartier par jour et encore si on a de la chance, de temps en temps une balade en forêt pour aider les humains à digérer leur déjeuner dominical et une partie de balle quand le môme est décidé, le tout agrémenté de croquettes et de bouts de fromage filer sous la table, ça rend pas un chien heureux. Désolée mais non, ce n'est pas une vie pour un chien, c'est un tunnel sans fin d'ennui, et si le chien ne manifeste pas toujours son mal être de façon dommageable pour nous, cela ne les empêche pas de souffrir de ce manque de sollicitation. Les plus mal lotis sont bien souvent ce qui souffrent en silence. Ceux qui manifestent leur incapacité à s'adapter à cette vie morne en aboyant lorsqu'ils sont seuls, détruisant le mobilier ou en grognant sur l'humain tentant de reprendre sa chaussette sont ceux qui se retrouver sur une petite annonce. Celui qui se tait et dort, ayant basculé dans un état de détresse acquise, est qualifié de chien heureux et vivra toute sa vie ainsi. Ou plutôt il passera à côté...
Un chien ça a besoin de tout ça pour être bien. Si vous ne pouvez/voulez pas lui offrir ce dont il a besoin, même pas ce dont il a envie, on ne parle pas de caprice ou d'extra ici mais bien de besoins fondamentaux, n'en prenez pas, et si vous en avez déjà un, faites quelque chose ou mettez vous en quête d'une famille pouvant y répondre.

Et là on rencontre un autre problème qui est qu'il n'y a probablement pas suffisamment de foyer capable d'accueillir un chien et de lui permettre de s'épanouir pour tous les chiens déjà présents sur le territoire. Avoir un chien ce n'est pas aussi facile que les films ou notre expérience lointaine nous laisse le croire, ce n'est pas juste lui faire une place sur le canapé et l'aimer. C'est un mode de vie.

Finalement lutter contre les abandons, ce n'est pas tenter de convaincre des gens qui ne s'occupent pas de leur chien comme celui ci le nécessite, quelle qu’en soit la raison, de le garder, c'est éviter que ce chien se retrouve dans cette famille. Donc c'est de lutter contre les acquisitions irréfléchies.Et ça passe par signer cette pétition, parce que la vente de chiots façon Picwic, ça va bien 2 minutes.

On peut tenter de limiter les abandons en élaborant des conditions de ventes complexes qui feront que, les seules personnes assez motivées pour se lancer là dedans auront à cœur de trouver des familles adaptées à leur chiot. C'est vrai. Mais vu le statut légal de l'animal domestique aujourd'hui et la solution plus que partielle qu'apporte la toute nouvelle législation, il va falloir également se pencher sur la demande.
Mais outre lutter contre cette possibilité d'achat compulsif, par les animaleries, les particuliers véreux (oui il y a des particuliers qui font un excellent travail de sélection, pas seulement sur la race mais aussi dans les acquéreurs) et les marchands de chiens (et là, la nouvelle loi ne va pas aider), il faut, à mon sens, modifier l'image du chien dans notre société. Un marché c'est une offre et une demande, et si on veut le réguler, il faut le faire des deux côtés.

Dans l'imaginaire collectif, à partir du moment où on a un jardin, on peut avoir un chien. Un chien ça a juste besoin d'une gamelle, d'une gratouille, d'une baballe et de pisser bornes à incendie. Et bien non, revoyez plus haut le cas du chien pavillon. C'est comme ça qu'on crée un bon nombre d'abandon. Parce qu'il ne faut pas se leurrer, les personnes qui postent une annonce pour replacer leur chien, contactent une association ou un refuge ne sont pas tous des raclures des bidés qui ont voulu jouer à la peluche ou à la poupée, des irresponsables notoires ou juste des enfoirés si on veut faire simple. Un bon paquet sont des personnes qui avaient au départ de bonnes intentions mais qui n'avaient aucune idée de ce qu'est un chien et de ce dans quoi ils s'embarquaient. Des gens qui ont grandi avec un chien sans prendre la mesure de l'investissement de leurs parents ou du mal être du chien de leur enfance, qui ont des amis ayant un chien qui sort quand ils le veulent, leur fait la fête quand ils rentrent et leur chauffe les pieds devant la télé. Bref des gens qui ont pris un chien avec en tête une idée tout à fait erronée de ce que cela représente sans s'en douter le moins du monde.




 Le problème c'est que contrôler la demande, c'est encore plus complexe que de restreindre l'offre ... Pendant un moment je faisais partie de ceux qui veulent une permis de détention pour tous les chiens, et pas seulement ceux qui sont arbitraires catégorisés. Un peu sur le modèle de ce qui se fait en Suisse, avec des cours avant et après l'adoption, afin d'exposer les besoins d'un chien, comment l'éduquer etc. Sauf que, la SCC choisissant comme couverture FB la photo d'un chien avec un collier à piques, j'ai un peu peur de ce que serait le contenu de ces cours. A la limite je préfère des gens qui savent rien à des gens qui pensent qu'un chien, ça se domine, leur intuition les mènera peut être à des choses moins stupides.

Il faudrait toutefois trouver un moyen de supplanter cette image du chien paillasson par celle d'un animal avide d'interactions. Et là... Je sèche... Donner une visibilité plus grande à toutes ses familles qui ont un chien qui vit une vraie vie de chien, avec des balades, des défis intellectuels et le droit d'exprimer sa nature, en dehors du cercle confidentiel des passionnés de cet animal domestique n'est pas chose aisée. L'essor des sports canins, en montrant à tous ce que peut faire une chien pourrait donner au grand public l'intuition qu'un chien ne peut pas se satisfaire de 20minutes en laisse par jour et de chahuter avec les enfants. C'est tout le bien que peuvent apporter les prestations télévisées comme celle de Charlie, les démonstrations en animalerie ou dans les événements municipaux. Mais il faudrait vraiment plus. Mais quoi...


Je tiens à préciser qu'il n'y a aucun jugement de valeur dans mon propos même si il peut paraître dur.  Ne pas être une "à chien", dans le sens pouvant offrir à un chien ce dont il a besoin pour s'épanouir, ne veut pas dire être une mauvaise personne. Chacun est différent, avec ses obligations, ses envies, ses possibilités et ses priorités. Il est donc tout à fait logique que tout le monde ne soit pas une personne à chien.